3/25/2015

Le contraste de l'éternité - Genèse

J'ai une semaine un peu occupée. J'irai faire un tour samedi au Salon du livre de Trois-Rivières, et j'essaie d'avancer dans mes autres obligations pour me libérer cette journée. Je risque de rôder, samedi, près du kiosque des Six Brumes, si vous voulez jaser de Bizarro, dont la prévente est toujours en cours.

D'ici là, j'aimerais prendre quelques instants pour vous parler du parcours de ma novella Le contraste de l'éternité, qui m'accompagne depuis un petit moment. Ne vous inquiétez pas, aucun spoiler ici.

J'ai commencé à l'écrire en novembre 2009, dans le but d'en faire une courte nouvelle. À l'époque, j'étais en pleine rédaction de mon mémoire en création littéraire, dans le cadre duquel je préparais un recueil de nouvelles alternant entre la science-fiction et la littérature réaliste. En début décembre, j'avais un texte d'une vingtaine de pages, mais je n'en étais pas satisfait. Le ton n'y était pas, c'était confus, incomplet (je m'étais un peu forcé à terminer la patente même si je sentais que ça ne marchait pas). Je l'ai donc écartée et me suis concentré sur d'autres idées de nouvelles, qui cadraient davantage avec le style de mon mémoire (qui est d'ailleurs disponible en ligne, en format PDF, pour les curieux).

Ce qui est intéressant, c'est que presque tous les éléments importants de la version finale de ma novella se trouvaient déjà dans cet embryon. Le titre, d'abord (qui est une référence à Paul Ricoeur), mais aussi le concept des automates (concept qui est aussi utilisé dans d'autres textes de mon mémoire, et que je compte bien explorer encore dans des histoires à venir) et d'un contrôleur, l'oeuf, l'artefact qu'il contient, les dédoublements, le temps fréquentiel, la fragmentation narrative causée par une explosion... Même la thématique générale y était, celle de la déchéance, de la corruption, de la perte de soi. C'est plus développé, évidemment, dans la novella, mais c'était quand même là dès le début, dans la nouvelle.

En janvier 2012, motivé par la récente parution d'Agonies, le premier collectif de La Maison des viscères, je suis revenu au texte, après avoir proposé le projet aux éditeurs, en leur présentant ça comme de la SF-horreur "un peu à la Event Horizon, mais avec des twists temporels et narratifs".

J'ai relu la nouvelle écrite deux ans plus tôt. Verdict: on efface tout et on recommence. Six mois plus tard, j'avais une novella d'un peu moins de 20 000 mots. Beaucoup de modifications par rapport à la version originale, outre la longueur: changement de narrateur, ajout de deux personnages (Léonie et Ada), une histoire cohérente (ou enfin, pas mal plus). C'est cette version que j'ai proposée à La Maison des viscères. La novella a été acceptée, si je me souviens bien, au moment du lancement d'Exodes (le deuxième collectif de la maison, fin novembre 2012).

Avant de commencer la direction littéraire, j'ai effectué une réécriture majeure du texte, y ajoutant presque 10 000 mots. Je me souviens surtout d'une modification importante apportée par cette réécriture, à part un remaniement complet de l'ordre des scènes: l'ajout du concept des nanomorphes, développé avec Ariane Gélinas dans la nouvelle L'ascendance des sélènes (parue dans un numéro de Clair/Obscur, puis dans son recueil Le sabbat des éphémères). J'ai beaucoup retravaillé le texte par la suite, évidemment, mais je considère quand même qu'à partir de ce moment-là, la novella était "feature-complete", comme on dit en bon français.

Voilà donc pour cette courte histoire d'une histoire.

3/18/2015

Prochain projet

Je travaille depuis un bon moment sur une fiction interactive (j'en ai parlé ici à plusieurs reprises), qui sert de complément à ma novella Le contraste de l'éternité (Bizarro, La Maison des viscères). En fait, je travaillais là-dessus, parce que c'est pas mal terminé. J'en suis aux dernières corrections, je devrais bientôt être en mesure de mettre une première version en ligne.

Ayant pas mal bouclé ce projet, ça me libère un peu de temps et d'espace mental pour travailler sur le plan de projet de roman fantastique (appelons-le provisoirement PRF). Je repars d'un projet de longue nouvelle qui n'avait pas vraiment abouti, et que je veux développer davantage. J'ai déjà des idées pour amener cette histoire dans une autre direction, ce que je trouve encourageant: ça s'enligne pour être davantage de l'écriture qu'une simple réécriture. J'ai très hâte d'avoir le temps de m'y consacrer!

3/11/2015

Quoi de neuf

Plutôt fatigué, ces temps-ci. Vivement le printemps (puis l'été, hein).

Le sommaire du prochain Brins d'éternité est complet. Son contenu sera dévoilé sous peu, avec l'illustration de couverture!

Côté projets personnels, la sortie du collectif Bizarro (chez La maison des viscères), dans lequel je ferai paraître la novella de SF-horreur Le contraste de l'éternité, est imminente. La prévente vient d'ailleurs de commencer. J'ai vraiment très hâte de lire les textes de Dave Côté et Éric Gauthier, avec qui je partage ce sommaire.

Je n'ai pas d'autres publications de prévues dans un avenir proche: pour ça, il faudrait que je recommence à utiliser FocusWriter de façon plus assidue, ce que je devrais être en mesure de faire dès mai prochain. Vive le printemps, comme je disais...

3/04/2015

Cobayes - Sarah et Sid, par Eve Patenaude


Sarah est une danseuse de ballet qui n’a pas réussi à percer et qui s’est recyclée comme danseuse érotique. De jour, Sid (diminutif de Simon-David) est un serveur dans un bistro branché; de nuit, il devient un hacker combattant les injustices sociales, tentant de racheter sa conscience, alourdie par la mort de son meilleur ami. Sid flirte avec Sarah, parvient à la convaincre de quitter son milieu de travail malsain. Mais le patron de la danseuse refuse de la laisser partir et lui extorque une somme d’argent considérable. Désespérés, les deux amoureux décident de participer conjointement à une étude clinique d’AlphaLab, et d’utiliser la compensation financière pour payer le patron de Sarah. Mais leur plan déraille lorsque les effets de la drogue expérimentale se font sentir, et qu’une insatiable envie de tuer s’empare des deux cobayes...

Coyabes – Sarah et Sid est un roman bien écrit et bien construit. La narration alterne constamment entre les deux personnages : un chapitre est focalisé sur Sarah, l’autre sur Sid, et ainsi de suite. L’auteur se permet aussi quelques libertés par rapport à sa structure, avec des articles de journaux, des rapports d’expérience et quelques scènes très distantes de techniciens informatiques anonymes. Dans l’ensemble, c’est très solide.

Les personnages sont bien campés et introduits avec brio, sauf peut-être pour la double occupation de Sid. Il est d’abord présenté comme un serveur très charismatique, puis, le chapitre suivant, comme un geek pratiquement antisocial; même si le roman parvient à allier les deux facettes de la personnalité de Sid (et même à y puiser une certaine richesse littéraire), la présentation de cette dualité est un peu brutale.

D’ailleurs, petit bémol : les descriptions de l’univers informatique de Sid semblent directement tirées de films hollywoodiens, avec la naïveté et les raccourcis navrants que cela implique. Dans un film, qui repose principalement sur la dimension visuelle du matériau narratif, il est compréhensible que le récit désire représenter graphiquement ce qui se produit sur un ordinateur. Ainsi, si un hacker se voit interdire l’accès à un serveur protégé, l’écran affichera quelque chose comme un gros « X » rouge, avec un « Accès refusé » en lettres clignotantes. C’est très clair. Mais dans un roman, ce genre de procédé n’est ni nécessaire ni désirable. En effet, l’auteur dispose d’outils narratifs plus fins et plus efficaces (dans le contexte d’un récit littéraire) pour traduire les péripéties informatiques de ses personnages. Vous direz que ça prend bien un littéraire-informaticien pour soulever ce genre de détail, et vous aurez raison.

Dans l’ensemble, le roman fonctionne très bien du côté de la progression dramatique. L’évolution de la relation entre Sarah et Sid semble naturelle : elle guide le récit plutôt que d’être à sa remorque. Cela permet un déroulement très fluide et crédible des événements qui mène au malheur des protagonistes. J’ai trouvé que le récit devient particulièrement intéressant lorsque le lecteur comprend que Sid est beaucoup moins réceptif que sa copine aux effets de la drogue expérimentale : ça permet une dynamique dramatique vraiment très efficace et puissante. Cependant, le roman prend ensuite une autre direction, et m’a paru faire du surplace jusqu’à la scène finale, qui, bien qu’intéressante, n’exploite pas tout son potentiel horrifique.

Il m’a semblé que le roman de Patenaude cherchait moins à insérer des détails intertextuels que celui de Addison. Peut-être, aussi, était-ce que ces détails étaient plus habillement cousus au récit.

J’ai aussi apprécié que ce roman fasse légèrement avancer l’intrigue générale de la série, en donnant quelques indices sur la réelle mission d’AlphaLab. J’espère vivement que les autres romans trouveront un moyen d’ajouter d’autres pièces au puzzle, sans tomber dans la redite.

Cobayes – Sarah et Sid est un roman dramatique très réussi. Malgré quelques scènes graphiques et intenses, je n’irais cependant pas jusqu’à le classer comme un roman d’horreur. Ça n’enlève rien, cependant, à sa qualité générale.


Critique parue dans Brins d'éternité 40